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15 mars 2013 5 15 /03 /mars /2013 17:17

 

Nous sommes le Dimanche 30 novembre 1941, entre 15 et 16 heures la météo est clémente, un jeune pilote Allemand de la base de Bourges, égaré se présente à l’atterrissage à bord de son biplans au dessus d’un pré situé sur la commune de Audes, en zone libre, dans le département  de l’Allier.

Pourquoi cette perdition bizarre ? En effet vue d’en haut de nombreux repères géographiques existaient : le Cher, la voie ferrée, mais avec une réflexion à postériori tout est toujours plus facile.

Descendu de son avion, le pilote soucieux de connaitre l’endroit où il se trouvait se dirigea en direction d’un agriculteur travaillant sur une parcelle de terre qui lui expliqua sans aucune réticence.

Rassuré l’aviateur Allemand retourna auprès de son appareil, mis le moteur en route, engagea sa manoeuvre pour le décollage,décolla, commença à prendre un peu d’altitude, amorça un virage, c’est alors que son moteur coupa à une trentaine de mètres de hauteur.

Problème technique, maladresse du pilote, omission d’alimentation du moteur en carburant ? Laissons notre imagination gambader.

Il traversa la route, évita la ligne électrique, se posa de nouveau dans un autre champ, mais avec un peu moins de réussite cette fois. Dans son élan, l’avion franchit un fossé d’évacuation d’eau, connu aussi sous le nom de rase, faucha son train d’atterrissage, et fini son périple dans une haie. Le pilote était groggy avec une petite plaie au cuir chevelu, laissant par contre son avion dans un piteux état, le condamnant à faire appel à de l’aide extérieure.

Dans un probable souci de vouloir se faire comprendre ce jeune pilote dans un Français très approximatif, ou dans un FrancAllemand tout aussi imprécis s’écria « Nestafone, Nestafone » . Vous aurez tous compris qu’il cherchait un téléphone.

Même si en Allemand l’orthographe est différente, la prononciation, hormis l’accent, est identique. En matière de logique, la contrariété, l’adrénaline, la peur peut quelque fois chambouler les plus aguerrit. Mais ce charabia allait plus ou moins porté ses fruits, et notre agriculteur l’orienta tant bien que mal par la route. Arrivée à destination ne trouvant aucun moyen de communication là bas, cet aviateur rebroussa chemin.

Au lieu de revenir vers son avion à l’intersection, il prit la direction opposé se dirigeant sans le savoir vers la ferme où probablement se trouvait le seul téléphone du village. Il pu alors avertir sa hiérarchie des évènements qui venaient de se dérouler.

Il y fût également soigné.

Ce soldat Allemand en quête d’un outil pour communiquer avait parcouru presque 5 kilomètres et demi.

 

lieu du décollage blog fin

 

 

lieu-de-crash-audes.jpg

 

 

 

Très vite il fut récupéré par sa hiérarchie. L’avion resta sur place et ce n’est que le lendemain qu’une délégation de quatre officiers se présenta à la ferme proche du lieu du crash. Une de ces 4 personnes parlait Français. Il était Lieutenant, s’appelait GEISSLER Oskar et avait la fonction d’interprète, né le 18 décembre 1895 à Hanau (source www.ww2.dk). Le Président de délégation spéciale était également présent, fonction équivalente au Maire.

Auguste, dit Gustave Sévat un cultivateur y exploitait les terres.

La conversation s’engagea bien évidement sur l’évènement de la veille, mais Gustave ayant fait Verdun, pour lui le mot Allemand n’existait pas, il avait plutôt dans son vocabulaire la dénomination « Boches ». Alors quand il vit ces soldats dans sa cour cela le « chauffa » beaucoup, mais malgré tout dans un élan de sagesse s’adressa au Maire :

« Bondiou, si voulian me renvoyer mon gars j’emmènerais ben leur avion à moitié chemin de Bourges avé mes bœufs »

Il faut dire que son fils avait été fait prisonnier en 1940, alors la tentation de profiter des relations encore courtoises pour le faire revenir fut une occasion inespérée. Le requête fut alors transmise via l’interprète à l’officier Allemand, lui demandant si cela était possible.

Ce soldat répondit alors que son grade ne lui permettait pas d’apporter une réponse, mais qu’il en parlerait. Il souligna, tout en donnant son adresse, que si son fils revenait, il aimerait qu’on lui écrive.

Mais cette délégation était avant tout venue formaliser la récupération de l’avion, prête à indemniser les dégâts qui n’étaient que minimes.

Petite tension momentanée au moment de l'enlèvement de l'épave, des instruments de bord (altimètre....) et le carnet de vol avait été dérobés, mais apaisée quand ces objets furent retrouvés comme par hasard à proximité de l’avion.

Après avoir été démonté, c’est à l’aide d’une remorque et d’un tracteur que ce biplans fut transporté à sa base d’origine, non sans difficultés pour sortir du terrain boueux.

 

Vous conviendrez aisément que l’histoire de ce crash est assez banale, alors fallait il la raconter ?

 

Oui.

 

3 mois après, le fils Sévat fit son apparition douché, propre, et habillé à son domicile.

Imaginez vous quelques secondes le ressentit de ce père de famille, qui en maitrisant son aversion envers un peuple avait eu espoir que l’humanité l’emporte sur la haine ?

Il avait eu raison. L’histoire nous donnera malheureusement bien trop de cas contraires.

Après mes investigations, je ne sais rien du Pilote Allemand, ni du type exact d'appareil.

Les archives de la gendarmerie ne possèdent aucun document relatant cet accident et nous ne saurons jamais si l’officier Allemand eut l’écho du retour du fils Sévat.

 

Un grand merci à Lydia pour ses encouragements et son aide, à Claude Grimaud pour le partage de ces travaux de recherches, à Monsieur Confesson André pour son témoignage.

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commentaires

J
What a remarkable story, Philippe. Thank you
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T
I don’t know what has to be thought different in this particular scenario. It must be noted that his son was taken to prison in the year 1940. Of course there are so many theories related to this issue. However, the truth is still unknown.
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C
N'étant pas spécialement amateur d'aviation, je suis tombé sur votre blog par hasard, et je l'ai trouvé passionnant, bravo. Par contre, je me demande si le paysage de maintenant comparé à ce qu'il était il y a 70 ans est juste. Il y a beaucoup de remembrement et de modification des haies, sans parler de la taille des arbres.<br /> En tout cas, bonne continuation pour votre blog passionnant.
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H
Bravo et merci de nous avoir relaté cette merveilleuse histoire !<br /> Bonne continuation !
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